Deux poètes allemands tombés dans la Somme

Deux poètes allemands tombés dans la Somme

Bien souvent nous pensons à honorer nos morts aux champs d'honneur ainsi que ceux de nos alliés et avec la même facilité que nous avons à commémorer la mémoire de ces hommes nous oublions, consciemment ou non, que des hommes portant d'autres uniformes sont eux aussi tombés. Ces soldats alors qualifiés d'adversaires sont aujourd'hui "les frères de misère" de nos Poilus. Les landser allemands foudroyés par la guerre étaient eux aussi des pères, des maris, des frères ... Et eux aussi ont le droit que leur souvenir soit rappelé, car comme leurs camarades français ils ont été sacrifiés bien vainement sur des champs de bataille bien trop grands pour tous ces hommes perdus dans la fureur et le bruit, écrasés par l'acier des armes auquel ils n'avaient que leur chair et leur courage à opposer. Quelque soit l'uniforme porté, le sang coulera toujours rouge...

Le 04 juillet 2015 à l'initiative du Souvenir Français localement représenté par Monsieur et Madame Queyrat et de Madame M. Andrejak maire de Vermandovillers, un hommage a été rendu à deux poètes allemands tombés dans la Somme et inhumés dans les ossuaires de la nécropole de Vermandovillers. A cette occasion, trois de nos membres se sont associés à cette cérémonie de "réconciliation par-dessus les tombes".

 

TOUTES PHOTOS 14-18 EN SOMME.

 

Alfred LICHTENSEIN.

Alfred lichtenstein 1914 copier

Né le 23 août 1889, Alfred Lichtensein étudiera le droit à Berlin tout en se consacrant à la poésie, dès 1910 il publie d'ailleurs certaines de ses oeuvres dans plusieurs revues. 1913 marque un tournant majeur pour le jeune Alfred, cette année il décroche un doctorat de droit et soucieux de faire son devoir s'engage, en octobre,  comme kriegsfreiwilliger, engagé volontaire, pour une durée d'un an au 2ème régiment d'infanterie bavarois caserné à Munich. C'est là que les trompettes de la guerre le trouveront. Dès 1913, il semblait pressentir le massacre qui s'annonçait, écrivant: "Voici qu'arrive, j'en ai le pressentiment, un tourbillon mortifère venu du nord lointain. Partout cela empeste le cadavre, le grand meurtre va commencer."

En 1914, il écrit un poème intitulé Départ pour le Front:

"Avant de mourir je dois juste écrire ce poéme.

Faites silence camarades, ne me dérangez pas.

Nous partons pour la guerre. La mort est notre destin.

Oh! Si seulement ma fiancée pouvait arrêter de geindre.

En quoi ai-je de l'importance? Je suis heureux de partir.

Ma mère pleure. On a besoin d'être fait d'acier.

Le soleil se couche sur l'horizon;

Bientôt on me jettera dans une jolie fosse commune.

Dans le ciel, le bon vieux crépuscule est tout rouge.

Dans treize jours peut-être, je serai mort."

 

Oeuvre prémonitoire, Richard sera tué le 25 septembre 1914 à Vermandovillers et c'est bien là, dans une tombe collective, qu'il repose au milieu de ses camarades.

 

Reinhard SORGE.

Sorge1 copierL'étudiant Sorge, insouciant et souriant ...

Sorge2 copier... le soldat Sorge, mûri et façonné par "notre mère la guerre".

 

Né le 29 janvier 1892, Sorge fut un discipe de Nietzsche et fut sensible à la critique globale des valeurs occidentales et de modernité que professait le philosophe. Toutefois, il s'en éloigna et s'attela à la rédaction d'une oeuvre empreinte tout à la fois de mysticisme et d'expressionnisme alors en vogue en Allemagne, cette influence se retrouve parfois dans l'oeuvre de Wiechert autre écrivain combattant de la Grande Guerre.

De 1914 à 1916, Sorge est au front où transparait sous l'uniforme l'humanisme du poète. Ainsi, dans une lettre adressée à sa soeur en novembre 1915, écrit-il: "Je vais bien car il m'a toujours été épargné de verser le sang. J'ai toujours le frisson lorsque des soldats plus anciens parlent du terrible carnage, homme contre homme dans les tranchées. Veuille Dieu continuer à m'en garder!".

En juillet 1916, il rédige ses dernières lignes qu'il intitule Grenades:

"Les grenades répandent leur pluie

Largement sur le champ infâme; 

Semailles de fer, promesses de bénédiction,

Germination intact du sens qui m'illumine.

Projectiles impitoyables, vous proclamez

Pour moi le chant de la foi:

Ô homme ton compagnon s'appelle Mort,

Ta victoire s'appelle Salut, ton désir s'appelle Dieu".

 

Quelques jours plus tard, le 20 juillet en pleine bataille de la Somme, Reinhard Sorge est tué à Ablaincourt. Aujourd'hui, lui aussi repose anonyme dans l'un des ossuaires de la nécropole de Vermandovillers.

 

La cérémonie à la nécropole de Vermandovillers.

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14-18 en Somme remercie

Monsieur et Madame Queyrat pour l'organisation de cet hommage, 

Madame Andrejak pour sa disponibilité et la transmission des éléments biographiques de cet article, 

les porte-drapeaux venus nombreux,

et nos membres Guillaume, Léo, Sylvain et bien sûr Maxence pour les photos.

 

 

"NE JAMAIS OUBLIER, TOUJOURS SE SOUVENIR"